La magie au service du colonialisme. La France se fait aider par un magicien en Algérie

L’histoire est pleine d’exemples authentiques de la façon de justifier une invasion de ses propres troupes dans un pays étranger devant ses propres citoyens. Cependant, les événements de 1827 n’étaient pas vraiment les leurs. La grave humiliation de la cour royale et l’agression physique odieuse contre l’ambassadeur de France sont devenues le casus belli, la justification officielle de l’invasion des troupes françaises en Algérie administrée par l’Empire ottoman. Mais la réalité est bien plus sobre que ce que la presse française tente de dépeindre.

Bref, la France achetait depuis des années des céréales à l’Algérie ottomane pour nourrir ses troupes. Mais pour des raisons politiques, il n’a pas pu faire de telles transactions directement, il les a faites par des intermédiaires juifs. Cela n’a pas trop bien fonctionné car le gouvernement français ne leur a pas remboursé leur achat. Les marchands devaient bientôt à l’administrateur, le régent algérien Hasan Bashaj-dej, une grosse somme d’or. Il est compréhensible qu’il les ait menacés de confiscation des céréales impayées. C’est alors que l’ambassadeur de France, Pierre Deval, intervient dans la dispute.

Il est difficile de juger de ses talents de diplomate aujourd’hui, mais ses tentatives pour expliquer aux dirigeants algériens que le grain était nécessaire sept millions ni l’un ni l’autre ne paierait les francs, mais la marchandise partirait toujours pour Marseille, un échec complet. Hasan Bašaj-dej, furieux et gesticulant sauvagement, aurait dû taper sur le nez de Deval avec son éventail duveteux et dire quelque chose de peu flatteur sur le moral des paiements à la cour de France. Et voilà.

La France en disgrâce ne pouvait pas laisser sans réponse la « mutilation » de ses diplomates, et parce que le régent algérien refusait de s’excuser et de fournir gratuitement le grain demandé en signe de réconciliation, l’armée française a d’abord initié un blocus naval de l’Algérie puis , en juin 1830 , invasion terrestre.

L’Algérie a été conquise mais pas vaincue

Face aux 34 000 hommes de l’une des armées les plus modernes d’Europe, dirigée par le général de Bourmont, l’Algérie n’avait aucune chance. Dans les trois semaines suivant l’achèvement, l’Algérie était plus ou moins complètement annexée et devenait la nouvelle colonie française. L’opération militaire spéciale se passe très bien pour le roi Charles X et son successeur, Louis Philippe d’Orléans. Parce que détourner l’attention des problèmes nationaux et parce que le pillage des ressources étrangères génère des revenus importants pour le budget de l’État.

L’Algérie est devenue une partie très lucrative du patrimoine de la couronne française, du grenier et du trésor français. Et aussi le lieu où travaillent des dizaines de milliers de Français, les terres confisquées aux indigènes.

Cependant, la colonie n’était pas vraiment paisible. La France ne contrôlait qu’une étendue de zones fertiles et densément peuplées sur les rives de la mer Méditerranée. Trois départements administratifs ont été formés ici, Alger, Constantine et Oran. Mais plus loin, vers les montagnes et les déserts, le pouvoir de la couronne n’a pas atteint. Et c’est là que les étincelles de la rébellion ont continué à brûler, se répandant parfois comme les flammes d’une grande rébellion dans les villes de la côte. Le marabout a joué un rôle important en entretenant et en attisant les flammes des émeutes.

Marabout (marabouts, murabits) sont les chefs spirituels du peuple. Ecclésiastique musulman, interprète de l’islam, chef idéologique de la résistance. Leur réputation incontestable n’était pas seulement qu’ils étaient considérés comme des sages et des saints. Les Algériens voyaient en eux un grand magicien, un parent de la volonté de Dieu, relié à la puissance d’Allah.

Les sorts et les lignes des vieux fakirs

On dit qu’ils sont capables de guérir d’un simple toucher, de gronder d’un coup d’œil, de déclencher des tempêtes de sable destructrices, de détruire les récoltes avec des criquets affamés, ou vice versa, par exemple, d’invoquer la pluie de l’hydratant nécessaire. Du moins c’est comme ça que ça semble toujours ex post. Par une savante combinaison de foi et de superstition, ces thaumaturges instantanés dirigent les esprits de la population algérienne encore instable et la motivent à mener une lutte constante, incitant à la rébellion.

Non pas que les Algériens aient une quelconque raison de haïr le régime colonial. L’invasion française a été suivie d’épidémies de choléra, de déplacements forcés et de famines, de la destruction des médinas des anciennes villes et de l’écroulement des tours. Cependant, les marabouts utilisent ce désastre comme une manifestation illustrative de la désapprobation de Dieu à l’égard de l’occupation.

Ils ont prouvé leur lien avec une puissance supérieure, dont ils ont osé parler, aux gens ordinaires en exécutant des tours de magie. Comme des escrocs, ils peuvent marcher sur des charbons ardents, broyer des éclats avec leurs dents, utiliser des sifflets pour attirer des cobras venimeux et hypnotiser. Ainsi, aucun laïc ne doutait de leur message divin. Et quand un marabout sorcier, après une démonstration de ruses, reçoit l’ordre de repousser les envahisseurs, c’est dur.

Les Français ont vite compris que les émeutes et les troubles en Algérie ne s’apaiseraient pas tant que le marabout serait considéré par la population locale comme un sorcier invincible. Et ils en ont conclu que la France devait se montrer aux Algériens non seulement comme une puissance militaire de premier ordre, mais aussi comme une puissance magique. Qu’il faut prouver que le magicien français est plus fort que le marabout algérien.

Il est difficile de dire aujourd’hui d’où vient exactement cette idée, mais l’empereur français Napoléon III. il aime vraiment ça. Les campagnes militaires répétées pour réprimer les émeutes algériennes ont été aussi inefficaces que coûteuses, tandis que le déploiement non violent de magiciens n’a pas nui au budget du pays.

Le nouveau et moderne père de la magie

Il est à noter que les Français, imprégnés des idées des Lumières, ne croyaient plus aux lignes. L’Empereur savait que tout cela n’était qu’un tour, une illusion, une tromperie et un jeu avec le lièvre coiffé d’un chapeau qui avait le même aspect. Mais il ne doutait pas que le magicien français gagnerait en duel avec le magicien arabe, car il avait délégué les meilleurs magiciens de toute la France pour des missions non conventionnelles. Robert Houdin.

La partie un peu cinglante est que Jean Eugène Robert-Houdin, alors âgé de quarante-huit ans, avait quitté l’activité de magicien de scène et vivait une retraite paisible. Mais le fait que le bureau de l’empereur l’ait convoqué avec des lettres personnelles, l’ait convoqué pour défendre le pays et lui ait décerné le titre de plus grand sorcier vivant de France, a eu un effet magique sur sa vanité.

Il n’a pas hésité à le faire 27 septembre 1856 prépare déjà la première représentation au théâtre algérien de Bab Azoun. Robert-Houdin est peut-être très arrogant, mais il connaît bien son métier. Il excellait en tant que magicien de scène, illusionniste et expert en astuces techniques. En même temps, il a pleinement utilisé son éducation et son travail civique jusqu’au bout. Il était horloger, inventeur. Il pouvait incorporer toutes sortes de machines à cocher, de minuteries, de mécanismes pneumatiques et de ressorts dans ses performances.

C’est pourquoi il est appelé le père du style moderne de magie. Il n’a pas besoin de robes à volants, de cannes en caoutchouc, de fausses barbes et de chapeaux pointus. Il est apparu dans une élégante queue de pie et des gants blancs, comme le parfait Monsieur français. Il exécute des tours complexes et jusqu’ici inconnus au monde. Il était bien conscient qu’il n’allait pas en Algérie en tournée régulière, mais que sa mission était semi-politique.

« Moi, simple jongleur, je suis fier de rendre service à mon pays », disait-il dans son livre agenda. « Je me suis rendu compte que la plupart des soulèvements qu’il fallait écraser en Algérie étaient à l’instigation d’agitateurs qui se disaient inspirés par le Prophète. En même temps, Marabut n’est pas un magicien plus grand que moi, voire plus bas. Mais ils peuvent influencer le fanatisme de leurs coreligionnaires par des ruses aussi primitives que les auditoires qu’ils présentent.

Pouvoir magique français

Comme prévu, sa première représentation à La magie française a été suivie non seulement par des spectateurs occasionnels de la rue, mais aussi par de curieux membres des tribus berbères envoyés par les marabouts. Ils pouvaient voir de vrais miracles de leurs propres yeux.

Un petit assistant a porté une boîte en métal sur la scène et l’a posée sur le sol. Robert-Houdin a choisi l’homme le plus grand du public, un chef de tribu, et l’a invité à venir le chercher. Ce que l’homme musclé n’aimait pas. Mais ensuite, elle l’a maudit devant le public en disant : « Maintenant, tu vas devenir faible comme un enfant ! » Et en effet, lorsque le géant tenta à nouveau de soulever la boîte, il ne bougea pas d’un pouce. Peu importe à quel point il tendait ses muscles, transpirait et se moquait, il ne pouvait pas le faire.

« Le grand magicien français peut être compatissant », a-t-il répondu Robert Houdin. « Je vous ai rendu votre pouvoir. Mais si vous l’utilisez contre les Français, vous le perdrez à jamais. » Il ramassa soudain la foutue boîte. C’était rassurant. Ce démon blanc était en fait capable de rendre le guerrier le plus fort de la tribu plus faible qu’un enfant !

Il est compréhensible que les Algériens superstitieux n’avaient aucune idée que tout le tour était rendu possible grâce à un puissant électroaimant installé sous la scène, que Robert-Houdin allumait et éteignait selon la situation par un mécanisme caché. L’action lourde de la poitrine a été répétée plusieurs fois dans diverses performances. Et il a dévoilé son secret petit à petit.

Lors d’une représentation à Bou Allem, devant un public insoumis, un marabout enragé tente de lancer une boîte à lumière sur un magicien français. Cependant, une force invisible lui a porté un tel coup qu’il s’est enfui de l’auditorium en hurlant et se sentant embarrassé. Bedýnka sait donner des décharges électriques.

« La magie française est plus puissante que la tromperie de vos faux prophètes », disait alors Robert-Houdin. « Mais si vous ne me croyez pas, voyez ce qu’il y a dedans », a-t-il poursuivi. Dans ce cas, il y avait un revolver chargé par l’un des chefs, avec des balles auto-signées. Il s’est laissé tirer dessus et a « attrapé » la balle avec une balle ordinaire une pomme.

Robert-Houdin a également pu endormir son assistant et laisser son corps flotter dans les airs, le faire disparaître sous un tapis, fabriquer des œufs en pierre à partir d’œufs ordinaires, retirer des boulets de canon des poches des acheteurs voyants et lire des lettres scellées. Il a exécuté les sorts les plus impossibles et les plus terrifiants. A l’issue de chacune de ces représentations, les chefs algériens complètement désorientés n’hésitaient pas à confirmer par leurs documents signés qu’ils avaient quitté le marabout et étaient entrés volontairement sous la protection magique des grands Français. Ainsi, le leadership des marabouts s’est érodé, leur force a été ébranlée.

Le grand sorcier de France a atteint son objectif, la rébellion des saints est terminée. Jean Eugène Robert-Houdin a pu retourner triomphalement dans sa patrie. Il reçoit des commandes et une généreuse pension, il peut continuer à se consacrer à la création. L’Algérie, en partie à son honneur, est restée une colonie française jusqu’en 1962.

Raimund Michel

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