Eric Toledano : Voilà une image de la société française d’aujourd’hui

Votre film n’a pas un personnage principal, mais plusieurs personnages qui ont une importance plus ou moins égale dans le film. Était-ce difficile d’écrire un scénario comme celui-là ?

En gros non. C’était un bon changement, nous l’avons apprécié. Chaque jour, quelque chose de différent nous attendait, nous avons composé un scénario à partir de plusieurs parties, c’était très bien. C’est la même chose pour le tournage : on s’amuse avec tout le monde.

N’avez-vous pas un peu peur du célèbre dicton « on s’amuse beaucoup sur le plateau, pas beaucoup au cinéma » ?

Ce n’est pas le cas, car nos films n’ont pas pour but de créer du plaisir. Tous les personnages se comportent très sérieusement et leur comportement apporte de la comédie aux situations individuelles et globales. Donc on s’est bien amusé, mais on n’a pas fait d’humour. La magie du rire au cinéma, c’est justement quand les gens ont une raison de rire des choses sérieuses.

Voulez-vous vous moquer des grandes fêtes et célébrations en général ?

Oui et non. Bien sûr, il y a une certaine exagération, voire une certaine ironie, dans de telles célébrations. Mais nous souhaitons surtout dresser un portrait de la société française d’aujourd’hui. Pas à travers une comédie romantique, mais pour dresser le portrait de personnes au travail, de leur statut social et de leurs relations avec les chefs d’entreprise. Il s’agit surtout d’existences brisées qui tentent de trouver leur place, de s’intégrer. La célébration à venir n’est que la toile de fond dans laquelle se déroule le film.

Photo de : va Kořínková

Éric Toledano à Prague

Pourquoi avoir choisi un mariage parmi toutes les célébrations possibles ?

Parce que c’est une excellente occasion d’observer la société, de capter les différences sociales en fonction du travail qu’ils accomplissent lors de leur préparation, de la place qu’ils occupent dans cette préparation. De plus, c’est une situation stressante, tout le monde est nerveux, sous pression, car un mariage est un jour qui – en règle générale – ne se répète pas avec la même composition de personnes, rien ne peut être amélioré la prochaine fois. Tout le monde agit de manière un peu folle. Et c’est une situation idéale pour ce genre de comédie.

Avez-vous un personnage haut en couleur préféré que vous avez rassemblé dans le film ?

Difficile. Je les aime tous parce que je ne peux pas écrire un personnage que je ne veux pas avoir. Je ne me soucie pas vraiment des gens que je n’aime pas, et je n’ai aucune raison de développer son caractère, de travailler avec lui psychologiquement…

J’ai préféré les deux Pakistanais, ceux qui ont « les mains derrière le dos », mais l’humour était génial.

Oui, ils ont aussi de la poésie. Préparer un si grand mariage rassemble une société multiculturelle qui accepte tout le monde. Bien que les deux ne soient venus que pour manger et gagner de l’argent, ils n’avaient pas vraiment envie de travailler, mais ils étaient drôles pour le public et aussi très touchants.

Comment vous et Olivier Nakach avez-vous travaillé sur ce scénario, avez-vous chacun créé « votre » personnage puis l’avez intégré à l’histoire ?

Nous écrivons ensemble comme d’habitude. La première concerne toujours les idées que nous proposons, puis nous les trions et partageons ce que tout le monde a écrit. Nous avons des ordinateurs face à face, échangeant des dialogues, devenant ainsi le premier public de chacun. Nous échangeons des idées et testons leur fonctionnement. C’est vraiment une collaboration quotidienne, on passe tout notre temps à écrire ensemble. Et c’est pareil sur le tournage, on est toujours ensemble. Tout comme un groupe de musique ou peut-être comme Simon et Garfunkel.

Olivier et vous aviez-vous le même sens de l’humour dès le début de votre collaboration ou vous êtes-vous lentement développés et rapprochés ?

Nous avons grandi ensemble donc c’était facile, nous avions le même groupe d’amis et donc notre sens de l’humour s’est développé ensemble, nous avons ri des mêmes choses dès notre plus jeune âge.

Lorsque vous avez tourné Les Intouchables, vous attendiez-vous à un tel succès ou avez-vous été surpris ?

Nous ne nous y attendions pas du tout ! Le film a été vu par 50 millions de téléspectateurs, c’est un chiffre absolument inimaginable ! Oui, nous savions que c’était une bonne histoire, nous avions un excellent casting et elle pourrait avoir du succès. Mais 50 millions ? Aucune idée. Et bien sûr, nous ne pensions pas que l’Amérique voudrait faire un remake, encore moins qu’il y aurait un remake en Inde et en Argentine. Le remake américain avec Bryan Cranston, Kevin Hart et Nicole Kidman sortira en mars (dans les salles tchèques le 22 mars – ndlr).

Et douze pays ont présenté Intouchable sous forme de pièce de théâtre – l’Allemagne, le Canada, l’Italie et d’autres. Tout ce qui se passe autour de ce film est extraordinaire, jamais prévisible et, à mon avis, ne pourra jamais se répéter. Mais j’espère que le public appréciera également notre nouveau film.

Lorraine Mathieu

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